La Fiscalité de votre Actionnariat Salarié aux Pays-Bas

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La Fiscalité de votre Actionnariat Salarié aux Pays-Bas

Évaluations, tourniquets et casse-tête de boîtes

Les principes non-fiscaux de la participation de salariés sont en grandes lignes les mêmes aux Pays-Bas qu’en France. En permettant aux salariés de participer à votre entreprise, vous pouvez les lier à votre entreprise sans que cela se fasse au détriment de votre cash-flow. Une belle exemple de ce mécanisme c’est la participation des dirigeants (managers / directeurs / cadres-clés) lors de ou suite à un rachat (LBO / private equity). La fiscalité de tout cela, par contre, est bien différent aux Pays-Bas que chez vous en France. Comment s’y prendre ? 5 thèmes à considérer en pilotant la fiscalité aux Pays-Bas.

1. Gain d’acquisition (« Tourniquet 1 »): vous êtes agent chargé de la retenue!

Selon mon expérience, presque chaque plan d’investissement d’une société privée déclenche une discussion avec le fisc sur le prix de marché des actions concernées. Le prix de marché est déterminé selon le système de preuve libre. A l’exception d’actions cotées à la bourse, il y a plusieurs méthodes pour déterminer la valeur. La méthode la plus connue reste celle de discounted cashflow (DCF).

L’intensité d’une telle discussion varie selon les modalités de l’investissement: montants, droits et obligations spéciales, niveau de leviers financiers, présence d’un prix de marché récent etc. Mal pilotée, cette discussion coûtera cher à l’employeur / société. Bien pilotée, ça ira souvent sans imposition importante. Il vaut mieux faire cette discussion explicitement avant tout investissement de salariés. Pourquoi?

Comme en France, il y a en amont une imposition sur un éventuel gain d’acquisition (en argot fiscal « Tourniquet 1 ») ainsi qu’après sur un gain de cession (le « Tourniquet 2 »). Votre société aux Pays-Bas sera presque toujours un agent chargé de la retenue pour le prélèvement socio-fiscal (loonheffing) et des cotisations pour l’assurance de salariés (werknemersverzekeringen) ainsi que la contribution pour l’assurance maladie des employeurs (bijdrage zorgverzekeringswet) – voyez ci-dessous.

Il peut y avoir un écart entre le prix de marché d’actions ou titres comparables (comme certificats) et le prix payé par le salarié. Cet écart sera normalement considéré comme un élément de rémunération, donc.. salaire imposable! Par-dessus le marché, si l’employé il/elle-même ne porte pas en réalité (via remboursement) ce prélèvement, il faut majorer le salaire. En pratique, cela double le prélèvement qui sera alors élevée a presque 100% ( 1 / (1-49.5%). Une situation extrême se présente si le salarié lui/elle-même ne paie rien. Les conséquences peuvent varier selon les circonstances (voyez sections 4 : Attribution d’Actions Gratuite et 5 : Stock-Options).

Le prélèvement socio-fiscal comprend l’impôt sur le salaire (loonbelasting) et les cotisations aux assurances sociales générales (premies volksverzekeringen). Il est calculé sur les revenus, ou plus exacte : le salaire imposable. Pour le contribuable individuel, le prélèvement socio-fiscal sera 100% déductible (imputable) via la déclaration annuelle (aangifte) et évaluation (aanslag) pour l’impôt sur le revenu (inkomstenbelasting), le IR. Les cotisations pour l’assurance de salariés et la contribution de l’employeur pour l’assurance maladie sont des charges pour l’employeur.

Les cotisations assurances sociales générales et de l’assurance de salariés sont plafonnées et donc moins onéreux qu’en France. L’impôt sur le salaire, par contre, ne l’est pas. Et avec un taux d’imposition marginal de 49.5% au-delà d’un salaire imposable de € 68.508 (barème 2021), cela joue un rôle important.

2. Gain de cession (« Tourniquet 2 »): la casse-tête des boîtes (Box 1, Box 2, Box 3) pour vos salariés… et un peu pour votre société.

Après avoir franchi le « Tourniquet 1 », les fruits d’une participation d’un salarié (dividendes et gains de cession) seront imposés via un des trois régimes d’imposition dans le système de l’IR Néerlandais : « Box 1 », « Box 2 » et « Box 3 ». Comme point de départ, théoriquement, ces ‘boîtes’ ne sont pas le souci de votre entreprise. Les trois ‘boîtes’ sont :

Box 1 : revenues de « travail et habitation » (inkomen uit werk en woning) : imposition progressive de <49.5% (tranche maximale 2021) sur les revenus réalisés, y compris résultat d’une entreprise, salaires, revenu de services personnels indépendantes et aussi… d’un « intérêt lucratif » (voyez 3 ci-dessous) ;

Box 2 : revenus d’une « participation substantielle » (inkomen uit aanmerkelijk belang) : en grandes lignes il s’agit ici de l’imposition de 26.9% (flat tax, 2021) sur les dividendes et gains de cession d’un intérêt de 5% ou plus dans le capital nominal (souscrit et payé) d’une société, à l’exception d’investissements déjà classés « intérêts lucratifs » ;

Box 3 : revenus de biens nets de « l’épargne et du placement » (inkomen uit sparen en beleggen) : imposition annuelle forfaitaire (taux effectif de <1.76%, 2021) sur une assiette imposable déterminée chaque 1 Janvier à partir de l’ensemble de biens et dettes imposables et non déjà prises en compte via Box 1 ou Box 2.

Dans la situation private equity, d’habitude il n’y a pas de dividendes mais un ou deux gains après un événement de liquidité ou une cession totale.

Le système forfaitaire de Box 3 a par conséquence que le montant du gain de cession lui-même n’est pas pertinent pour l’imposition. Pas mal de salariés qui s’attendent à un gain de cession important auront un appétit de passer via Box 3 pour leurs actions. On paie le forfait souvent modeste chaque an, on touche le gain sans imposition additionnelle. Des pertes inattendues, en revanche, ne seront pas déductibles.

Comme dit, le casse-tête des boîtes ne devrait vraiment pas être votre souci en tant que employeur et groupe franco-néerlandaise. Il n’y a qu’un tout petite complication. En passant le Tourniquet 1 (ci-dessus) pour le gain d’acquisition et vos obligations de prélèvement, le fisc prendra en compte, au moins indirectement, l’imposition du futur gain d’acquisition!

La solution : trouver un accord avec le fisc ainsi pour l’imposition du gain de cession ainsi que pour (l’absence de) le gain d’acquisition. Vous pouvez trouver un bilan et tout le monde, fisc, salariés et les autres actionnaires , sera content.

Comment s’y prendre ? Voilà quelques ‘règles du jeu’ pour trouver ce bilan.

Tout d’abord, il faut réaliser que le choix entre Box 2 et Box 3 est à vous et votre salariés. Structurer via ≥5% ou via <5% déterminera le résultat.

Mais encore, si les actions sont déjà classées comme « intérêt lucratif », pourtant, il n’y pas de choix, c’est Box 1. Le gain de cession des actions se trouvera au sein de Box 1 en raison d’être classées « intérêt lucratif ». Vos salariés n’adorent pas parce que ça veut dire imposition de <49.5% sur le futur gain net.

Finalement, « l’intérêt lucratif » est souvent – pas toujours – une zone grise. Dans ce cas, le fisc sera moins inquiété et plus flexible en ce qui concerne la « Tourniquet 1 » et aussi l’application de Box 1 si le régime pour le gain de cession sera structuré via Box 2. Dans ce cas, une imposition de – au minimum – 26.9% sur le gain total sera plus ou moins garanti pour l’état.

Donc souvent le ‘juste milieu’ sera Box 2. Mais il y a des cas ou Box 3 ou Box 1 sera le résultat incontournable.

3. L’intérêt lucratif – à éviter, mais qu’est-ce que c’est?

L’essentiel de ce phénomène compliqué est le suivant. Surtout les montages de private equity et les fonds d’investissements en général ont déclenché une réaction du législateur à la fin des années 2000. L’enjeu: imposer les revenus de capital qui sont en réalité plutôt une rémunération pour travail que pour capital.

Depuis 2009, l’assiette de Box 1 (travail, entreprise personnelle) a été élargie en y comprenant les revenus (dividendes, intérêts payés, gain de cession, compensation) de

  • une classe d’actions du capital d’une société subordonnées à toute autre classe d’actions et qui (i) représente moins de 10% du capital souscrit total ou (ii) offre un dividende préférentiel de ≥15% par an.
  • Prêts dont l’intérêt dépend pour (+/-) 30% de la réalisation d’objectifs déterminés pour le management ou les actionnaires
  • D’autres droits contractuels qui ressemblent aux catégories précédentes (actions, prêts).
  • Des dettes de salariés avec des conditions d’abandon automatique

Tout cela sera un intérêt lucratif à condition qu’il ressort des ‘faits et circonstances’ lors de la création des actions, prêts, droits ou dettes qu’ils ‘visent à constituer une rémunération pour des activités du contribuable’. Activités, ça veut dire, services personnels ou travail salarié.

Le diable est comme toujours dans les détails. Bien sûr, un élément très important pour l’analyse les faits et circonstances est la présence – ou l’absence – d’un contrat ou relation d’emploi ou un contrat de service. Autrement dit, sans un tel contrat entre la société et un actionnaire, normalement il n’y a pas d’intérêt lucratif non plus. Par contre, dans le cas d’un actionnaire-salarié, la relation employeur-employé sera scrupuleusement prise en compte par le fisc. Le législateur a donné quelques exemples de circonstances et faits typiquement ‘lucratifs’ et donc souvent censé partiellement une rémunération pour quelque chose d’autre que capital :

  • un effet de levier (leverage) et/ou envy ratio important,
  • des droits comme un ratchet, et
  • des rémunérations selon le modèle d’un carried interest

4. L’attribution d’actions gratuites (« AGA ») et sa (manque d’) homologue aux Pays-Bas

Très connu en France, l’attribution d’actions gratuites ou « AGA » est une opération régulée par laquelle une entreprise donne ses propres actions à ses salariés ou à ses dirigeants. Après une période d’acquisition (≥1 an) le salarié devient propriétaire des actions. D’habitude, l’entreprise fixe une période de conservation des actions. Le salarié-actionnaire ne peut pas vendre les actions avant la fin de cette période. Le cumul de la période d’acquisition et de la période de conservation ne peut pas être inférieur à 2 ans.

Est-ce que il existe un dispositif pareil aux Pays-Bas? Pas tout à fait. Bien-sûr, une entreprise néerlandaise peut attribuer des actions dans son propre capital ou de sa société mère en France aux salariés néerlandais. Il n’y a pas de règles de droit de travail ou de droit fiscal spécifiques. Selon le système normal, tout écart entre le prix de marché et le prix payé sera pris en compte comme élément de salaire. Donc si un salarié devient propriétaire d’actions de € 10.000, ne paie toutefois rien, son salaire pour le retenu sera majoré de €10.000. Si ce salarié ne porte ou rembourse pas le prélèvement, il y a une deuxième majoration. Par conséquence, si le taux d’imposition serait de 49.5%, le salaire brut sera de [1 / [1 – 0.495] ] * 10.000 soit 19.802. Le prélèvement déclarable par l’entreprise, sans prendre en compte les crédit d’impôt, sera donc de 49,5% * 19.802 = 9.802. Ça coûte cher…

L’exception est de faire, lors de l’attribution, l’usage du phénomène de prélèvement libératoire (eindheffing) de 80% pour salaires payés en nature. Ce prélèvement serait de € 8.000 pour l’exemple fourni. Or, en cas d’imposition corrective par les autorités après contrôle fiscal, ce taux modéré n’est plus disponible.

Pour l’impôt sur les sociétés, l’attribution d’actions ne crée pas une dépense déductible pour l’entreprise. Faites attention que le fisc prend parfois la position que le prélèvement ne soit déductible non plus. C’est pourtant une position pas éclairée par la loi ou les cours fiscales.

5. Fiscalité de stock-options : le vilain canard parmi les dispositifs fiscaux

Les stock-options offrent la possibilité – pas l’obligation – de souscrire ou d’acheter des titres d’une société à ou à parti d’un moment donné à un prix qui est fixé définitivement le jour où l’option est offerte : le strike price (prix d’exercice). Parfois le droit il-même a un prix mais le plus souvent le salarié ne paie rien en amont pour obtenir le droit. C’est-à-dire que les stock-options sont attribuées gratuitement et le strike price est typiquement plus élevé que la value actuelle des actions.

On peut distinguer trois ‘gains’ possible :

  • le gain d’acquisition d’un droit d’option
  • le gain de la levée d’une option et acquisition des actions sous-jacentes et
  • le gain de cession de ces actions plus tard.

Aux Pays-Bas, le phénomène de stock-options connait depuis 2005 un seul dispositif fiscal très spécifique et incontournable. Malheureusement, il ne s’agit pas d’un dispositif attractif pour le salarié. Les stock-options attribuées aux salariés sont imposés comme suivant.

L’attribution d’options n’a pas (encore) de pertinence pour le retenu du prélèvement socio-fiscal. Autrement dit: il ne se produit jamais un gain d’acquisition imposable et on passe le « Tourniquet 1 » sans payer. Donc, pas d’imposition même si au moment de l’attribution définitive d’une option au salarié, il ressort de la value actuelle des actions et le strike price que le droit d’option a une valeur supérieure au prix payé en amont par le salarié (le plus souvent : zéro).

Au moment de la levée des stock-options et acquisition d’actions, la différence entre la valeur des actions obtenues et le prix payé par le salarié dans sa totalité (prix en amont + strike price) sera considérée comme salaire imposable. Et c’est l’entreprise qui doit retenir et déclarer l’impôt. Normalement, les conditions d’un ‘option plan’ précisent que  toute imposition sera pour le compte du salarié.

Les salaires sont imposables selon les barèmes progressives de Box 1, donc on peut dire que le gain d’acquisition et le gain de levée seront imposables ensemble au sein de Box 1.

Le gain de cession plus tard suivra (normalement) le régime de Box 3 (actions <5%) ou de Box 2 (action ≥5%).

Comme pour l’AGA, les stock-options ne donnent aucune possibilité de déduction fiscale pour l’impôt sur les sociétés de l’entreprise.

Les seuls avantages, tout court, sont que l’imposition et le taux suit une piste assez simple et prédictible sans discussions et l’imposition ne se produit qu’après le gain de levée. Les stock-options sont le seul moyen pour éviter toute imposition sur un gain d’acquisition évident.

Pourtant, pour les sociétés non-cotées, les stock-options peuvent déclencher de discussions animées au sujet de valuation lors de la levée. Pire, parfois il n’y pas de liquidité pour payer les impôts. Surtout pour les investissements de private equity, la meilleure solution est de reporter la levée jusqu’au cession totale (ce qui demande conditions ‘american style’ conditions). Ou encore mieux : éviter les stock-options tout court.

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